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n’en connaît pas la pénalité. On présume que c’était la relégation, car l’inceste n’était puni que de la déportation. Les mœurs étaient si corrompues sous Auguste qu’on le pressa de faire des lois plus sévères contre l’adultère : « Faites comme moi, dit-il aux sénateurs, corrigez vos femmes. » Il ne dit pas l’espèce de correction qui lui avait bien réussi. Tibère établit un tribunal domestique. Montesquieu trouve que l’institution en était admirable, en ce qu’elle inspirait la crainte salutaire d’être à la première faute traduit publiquement devant un tribunal. Antonin ordonna que le mari qui déposait une plainte d’adultère contre sa femme devait être exempt de reproche sur ce point. Plus tard il fut ordonné aux époux malheureux de dénoncer les désordres de leurs femmes.

4. Les lois des peuples modernes réprouvent toutes l’adultère. Cependant leur législation a un caractère tout spécial ; c’est qu’au lieu de regarder l’adultère comme un crime contre la société, elle tend à ne le regarder que comme un tort contre le conjoint. – En Angleterre, par une pruderie de langage bien étrange, l’adultère se nomme criminal conversation ; une forte amende quelquefois l’exil, en constituent la pénalité. Les lois françaises n’ont pas toujours admis la même pénalité contre l’adultère. Avant la première révolution, les femmes adultères pouvant payer pension étaient renfermées pour deux ans dans un monastère ; elles étaient forcées d’y passer leur vie si leur mari refusait de les reprendre. Si le mari était pauvre, la femme pouvait être renfermée dans un lieu de refuge comme les filles débauchées (Courtin, Encyclopédie moderne). Le Code pénal de 1791 avait gardé le silence sur ce crime. Le Code Napoléon qui régit la pénalité actuelle a réparé cette omission. Il établit une différence entre l’homme et la femme adultère, fondé sans doute sur ce que l’infidélité du mari ne fait à la personne associée à son sort qu’un tort passager, tandis que l’adultère de la femme peut avoir des conséquences durables et permanentes en introduisant dans la famille des enfants qui lui sont étrangers. C’est sur ce motif que la loi déclare que l’adultère de la femme, sans en spécifier l’espèce, suffit pour demander la séparation de corps (Cod. civ., art. 299). Il exige que le mari ait tenu une concubine dans sa maison pour que la femme puisse demander cette séparation (Art. 230). Voy. Séparation de corps. La femme qui est convaincue d’adultère est condamnée à la réclusion dans une maison de correction, pour un temps déterminé, qui ne peut être moindre de trois mois, ni excéder deux années. Toutefois le mari reste maître d’arrêter l’effet de cette condamnation en consentant à reprendre sa femme (Code pénal, art. 337 Code civil, art. 308, 309). Le mari qui est convaincu d’avoir entretenu une concubine dans la maison conjugale est puni d’une amende de cent francs à deux mille francs (Code pénal, art. 239). Le complice de la femme encourt la même amende, et subit de plus l’emprisonnement de la femme (Code pénal, art. 338 ;. – Ce qui nous montre que la loi française semble aussi mettra l’adultère au rang des crimes qui n’intéressent que le conjoint et non la société, c’est l’article 336 du Code pénal qui déclare que l’adultère de la femme ne pourra être dénoncé que par le mari, qui ne peut jouir de cette faculté s’il tient une concubine dans la maison conjugale (Code pénal, art. 399). Le mari tenant une concubine dans la maison conjugale ne peut être poursuivi que sur la plainte de la femme (Art. 339). La législation française, en ne regardant l’adultère que comme un crime purement relatif au conjoint, tombe dans une très-grave erreur ; il suffit d’en examiner les effets pour comprendre qu’il a une très-grande influence sur l’ordre social tout entier.

5. L’adultère produit les plus grands maux ; il trouble la famille, y apporte une guerre intestine. C’est de là que naissent les divisions éclatantes, les séparations scandaleuses, les diffamations réciproques, les haines déclarées entre les familles. À quels excès n’est pas capable de se porter la fureur de l’homme trompé dans son honneur, dont le cœur est brisé dans ses affections les plus chères ? La loi a si bien compris l’effet que l’adultère doit produire sur l’époux innocent, qu’elle déclare excusable meurtre commis par le mari sur sa femme surprise en flagrant délit d’adultère (Cod. pén., art. 324). Qui pourrait énumérer les forfaits que l’adultère a fait commettre ? Il a mis le poignard assassin entre les mains de l’époux ; placé entre les doigts de la femme, trop faible pour saisir le poignard, une coupe pleine d’un poison homicide. Voyez encore ces enfants dont le cœur est brisé, n’osant demander où est leur père, craignant d’aller se jeter entre les bras de leur mère. Après ces grands maux, parlerons-nous de l’incertitude jetée dans les fortunes du vol commis par les enfants adultérins sur les enfants légitimes ? Ah ! malheur à l’époux infidèle, et mille fois malheur à l’épouse adultère !

6. Le moraliste ne doit pas seulement montrer la gravité du mal ; il doit aussi en rechercher la source et indiquer les remèdes qu’on peut lui appliquer.

Sans doute, la source primitive et originelle du mal se trouve dans cet entraînement de la nature qui porte les sexes l’un vers l’autre ; dans la corruption que le péché originel a mis dans notre cœur. Le mariage ayant été établi pour remédier à cette corruption et pour satisfaire cet entraînement, il semble que dans l’union de deux époux le penchant devrait être, sinon détruit, du moins affaibli. Mais il y a des causes qui sont le fait des hommes. Nous en trouvons dans l’éducation et dans la manière dont se font les mariages.

7. Quels sont les principes de l’éducation d’une jeune personne ? Cherche-t-on à lui inspirer la retenue, la modestie ? Non. On veut que les femmes soient des objets de séduction pour les sens bien plus que pour