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DICTIONNAIRE DE THEOLOGIE MORALE


Délectation morose.. Nous prions instamment le Seigneur qu’il daigne diriger lui-même noire plume, afin de ne pas blesser les oreilles pieuses.

5. Des sources de l’impureté et des remèdes qu’on peut leur appliquer. — Les causes de l’impureté sont infinies. Elle naît souvent des objets qui semblent avoir le moins de rapport avec elle. Les moralistes ramènent ordinairement toutes les sources d’impureté aux pensées, aux désirs, aux regards, aux paroles, aux actions. Cette division nous paraît convenable ; elle envisage l’impureté dans tous ses degrés. Elle remonte à la source du fleuve et le suit jusqu’à la mer corrompue où il va se jeter.

I. Des pensées comme source d’impureté et des remèdes à leur appliquer.

6. Le christianisme a pénétré toute la profondeur de la nature humaine ; il a compris qu’il ne suffit point de condamner le vice et les actes contraires à la loi ; qu’il faut en tarir la source pour cela il a remonté jusqu’aux pensées. La pensée est en effet le premier mobile de nos actions c’est elle qui fait naître le désir, qui donne l’impulsion aux principes qui produisent les actes libres. Qu’est-ce qu’une action ? ce n’est qu’une pensée réalisée. Les pensées ont donc une très-grande influence sur l’homme s’il était possible de connaître celles dont une personne se nourrit habituellement, il serait facile de connaître ses actes les plus ordinaires.

Si toutes les pensées ont une grande influence sur les déterminations de l’homme, il n’en est point qui aient une plus grande puissance que les pensées impures. Elles ont un attrait tout particulier, leur douceur est enivrante, leur voix est celle d’une sirène enchanteresse. Elles excitent des émotions suaves, font bondir le cœur, lancent le feu dans les veines, peignent les images les plus délirantes. Rien n’échappe à la pensée : ni les détours, ni les désirs, ni les mouvements du cœur, ni les impressions du corps, ni les actions les plus insensées.

De semblables pensées, lorsqu’elles sont la nourriture habituelle du cœur, sont un indice presque certain de chutes déplorables. Un ange du ciel ne pourrait résister à un semblable danger comment l’homme, faible, débile pourrait-il se soutenir en augmentant sa faiblesse ? Il sera certainement vaincu, s’il se livre à de semblables pensées. Au point de vue rationnel, aussi bien qu’au point de vue religieux et moral, la pensée impure librement acceptée est donc une grande faute. Celui qui se nourrit d’images lascives, qui se repaît de pensées impures, est coupable d’un grand péché.

8. Je sais qu’on apporte pour excuse l’impossibilité de tarir la source des pensées impures qu’elles s’imposent aux âmes chastes, qui les ont en horreur, et qu’étant involontaires elles ne peuvent être une faute. Il est cartain que si elles sont réellement involontaires, elles n’imposent aucune responsabilité. Quoiqu’il nous soit impossible d’entrer dans la conscience d’un homme pour le juger, nous croyons cependant devoir observer qu’il y a sur ce point beaucoup d’illusion. Nous allons tracer la conduite que doit tenir toute personne sincèrement amie de la pudeur. Chacun pourra voir s’il l’a suivie, et possédera un moyen de juger ses pensées.

Premier remède contre les pensées impures.

9. Le premier remède, qui est le plus important de tous, qui s’étend à toutes les vertus aussi bien qu’à la pudeur, c’est de s’habituer à réfléchir sur ses pensées. L’homme qui a assez de fermeté d’âme pour repousser de son esprit toutes les pensées oiseuses, les imaginations futiles et dangereuses, s’ouvre la carrière du véritable mérite. En s’appliquant la méditation des vérités sérieuses, en recherchant l’utile, même dans les récréations, les pensées s’agrandissent, les puissances de l’âme se fortifient. C’est l’habitude des réflexions utiles qui a fait les grands hommes. Si, contre notre désir, notre imagination s’échappe encore, si elle voltige sur mille objets séduisants, ayons des moments marqués pour nous interroger nous-mêmes demandons-nous compte de nos pensées. Si notre conscience nous atteste que nous n’aurons pas lieu d’en rougir en présence de l’univers assemblé, soyons en paix ; si elles ont pour objet ce qu’il serait honteux de faire ou de regarder, repoussons-les de notre esprit. Je sais que cette tâche sera souvent difficile. Les pensées mauvaises nous poursuivent sans cesse, s’attachent à nos pas, marchent à nos côtés. Pour les repousser avec succès, il faut avoir recours au

Second remède.

10. Pour prêter un appui au premier remède, il est nécessaire d’en employer un second il faut être constamment occupé. Malheur à ceux dont les jours se passent à rien faire ! qui vivent dans une habitude de dissipation, qui ne s’occupent que de plaisirs passés, qui en recherchent sans cesse de nouveaux ! Les pensées vaines pénètrent dans leur esprit, l’occupent tout entier ; elles le nourrissent de fantômes : comment les plaisirs sensuels et les appétits de la chair ne feraient-ils pas sentir leurs aiguillons ? La passion pénètre par toutes les voies ; comment les pensées seraient-elles pures ?

Lorsqu’on est occupé de choses sérieuses, que l’esprit y est sincèrement appliqué, les pensées étrangères ne peuvent se montrer avec la même énergie, ni avec la même insistance. C’est de là que vient cette maxime Diabolus irivenia ! te semper occupatum. Dans une vie bien remplie, les pensées mauvaises trouvent peu d’espace pour se faire jour le démon est vaincu.

Il y a des moments d’un repos nécessaire. Pour les âmes livrées aux pensées mauvaises, il faut que les récréations elles-mêmes soient une occupation. Cette occupation ne sera pas fatigante, mais elle devra remplir l’esprit. L’homme de cabinet trouvera dans