Page:Mignet - Histoire de la Révolution française, 1838.djvu/143

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
139
ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE.

de notre mission ; parlons aux ministres, au roi, à l’Europe entière, avec la fermeté qui nous convient. Disons à nos ministres, que jusqu’ici la nation n’est pas très satisfaite de la conduite de chacun d’eux ; que désormais ils n’ont à choisir qu’entre la reconnaissance publique et la vengeance des lois, et que, par le mot responsabilité, nous entendons la mort. Disons au roi, que son intérêt est de défendre la constitution ; qu’il ne règne que par le peuple et pour le peuple, que la nation est son souverain, et qu’il est sujet à la loi. Disons à l’Europe, que le peuple français s’il tire l’épée, en jettera le fourreau ; qu’il n’ira le chercher que couronné des lauriers de la victoire ; que, si des cabinets engagent les rois dans une guerre contre les peuples, nous engagerons les peuples dans une guerre à mort contre les rois. Disons-lui que tous les combats que se livreront les peuples par ordre des despotes.... » (Et comme on l’interrompait par des applaudissements, il s’écria : ) « N’applaudissez pas, n’applaudissez pas ; respectez mon enthousiasme, c’est celui de la liberté ! Disons donc à l’Europe, que tous les combats que se livrent les peuples, par ordre des despotes, ressemblent aux coups que deux amis, excités par un instigateur perfide, se portent dans l’obscurité. Si la clarté du jour vient à paraître, ils jettent leurs armes, s’embrassent, et châtient celui qui les trompait ; de même, si au moment où les armées ennemies lutteront avec les nôtres, le jour de la philosophie frappe leurs yeux, les peuples s’embrasseront à la face des tyrans détrônés, de la terre consolée et du ciel satisfait. »

L’assemblée décréta avec transport, et à l’unanimité, la mesure proposée, et envoya, le 29 novembre, un message au roi. Vaublanc fut l’organe de cette députation. « Sire, dit-il à Louis XVI, à peine l’assemblée nationale a-t-elle porté ses regards sur la situation du royaume, qu’elle s’est aperçue que les troubles qui l’agitent encore ont leur source dans les préparatifs criminels des émigrés français. Leur audace est soutenue par des princes allemands qui mécon-