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CONVENTION NATIONALE.

riez aussi vivement que les Montagnards, on les accusa d’être complices de sa défection, et ce fut un nouveau grief ajouté à tous les autres. Leurs ennemis devenaient de jour en jour plus puissants, et c’était dans les moments de dangers publics qu’ils étaient surtout redoutables. Jusque-là, dans la lutte qui s’était établie entre les deux partis, ils l’avaient emporté sur tous les points. Ils avaient arrêté les poursuites contre les massacres de septembre ; ils avaient fait maintenir les usurpations de la commune ; ils avaient obtenu d’abord le jugement, puis la mort de Louis XVI ; par leurs menées, les pillages de février et la conspiration du 10 mars étaient demeurés impunis ; ils avaient fait décréter le tribunal révolutionnaire, malgré les Girondins ; à force de dégoûts, ils avaient chassé Roland du ministère ; ils venaient de triompher de Dumouriez. Il ne leur restait plus qu’à enlever aux Girondins leur dernier asile, l’assemblée : c’est ce qu’ils commencèrent le 10 avril, et ce qu’ils achevèrent le 2 juin.

Robespierre poursuivit nominativement Brissot, Guadet, Vergniaud, Pétion, Gensonné, dans la convention ; Marat les dénonça dans les sociétés populaires. Il écrivit, en qualité de président des Jacobins, une adresse aux départements dans laquelle il invoquait le tonnerre des pétitions et des accusations contre les traîtres et les délégués infidèles qui avaient voulu sauver le tyran en votant l’appel au peuple ou la réclusion. La droite et la Plaine de la convention sentirent qu’il fallait se réunir. Marat fut envoyé devant le tribunal révolutionnaire. Cette nouvelle mit en rumeur les clubs, la multitude et la commune. En représailles, le maire Pache vint, au nom de trente-cinq sections et du conseil général, demander l’expulsion des principaux Girondins. Le jeune Boyer-Fonfrède demanda d’être compris dans la proscription de ses collègues, et les membres de la droite et de la Plaine se levèrent, en criant : Tous ! tous ! Cette pétition, quoique déclarée calomnieuse, fut une première attaque du dehors contre la convention, et elle prépara les esprits à la ruine de la Gironde.