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CONVENTION NATIONALE.

dénonça Billaud, Collot, Barrère, du comité de salut public ; Vadier, Amar et Vouland, du comité de sûreté générale. La veille, Tallien s’était violemment élevé contre le régime de la terreur, et Lecointre avait été encouragé dans son attaque par l’effet qu’avaient produit les paroles de Tallien. Il présenta contre eux vingt-trois chefs d’accusation ; il leur imputa toutes les mesures de cruauté ou de tyrannie qu’ils rejetaient sur les triumvirs, et il les appela les continuateurs de Robespierre. Cette dénonciation mit le trouble dans l’assemblée et souleva tous ceux qui soutenaient les comités, ou qui ne voulaient plus de divisions dans la république. « Si les crimes que Lecointre nous reproche, dit Billaud-Varennes, étaient prouvés, s’ils étaient aussi réels qu’ils sont absurdes et chimériques, sans doute il n’est aucun de nous dont la tête ne dût tomber sur l’échafaud. Mais je défie Lecointre de prouver, par des pièces justificatives, par des témoignages dignes de foi, aucun des faits dont il nous accuse. » Il réfuta les chefs d’accusation de Lecointre ; il reprocha à ses ennemis d’être des hommes corrompus, des intrigants qui voulaient le sacrifier à la mémoire de Danton, d’un conspirateur odieux, l’espérance de toutes les factions parricides. « Que veulent-ils donc, ces hommes, poursuivit-il, qui nous appellent les continuateurs de Robespierre ? Citoyens, savez-vous ce qu’ils veulent ? Faire mourir la liberté sur la tombe du tyran. » La dénonciation de Lecointre était prématurée ; la convention presque entière la déclara calomnieuse. Les accusés et leurs amis se livraient aux éclats d’une indignation non contenue et encore toute-puissante, car ils étaient attaqués pour la première fois ; l’accusateur était presque interdit et peu soutenu. Aussi Billaud-Varennes et les siens l’emportèrent facilement cette fois.

Quelques jours après, l’époque du renouvellement des comités par tiers arriva. Le sort désigna, comme membres sortants, Barrère, Carnot, Robert Lindet, au comité de salut public ; Vadier, Vouland, Moyse Baile, au comité de sûreté générale. On fit entrer des thermidoriens ; et Collot-d’Herbois