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ASSEMBLÉE CONSTITUANTE.

« Messieurs, dit le roi avec émotion, ce jour que mon cœur attendait tant est enfin arrivé, et je me vois entouré des représentants de la nation à laquelle je me fais gloire de commander. Un long intervalle s’était écoulé depuis les dernières tenues des états-généraux ; et, quoique la convocation de ces assemblées parût être tombée en désuétude, je n’ai pas balancé à rétablir un usage dont le royaume peut tirer une nouvelle force, et qui peut ouvrir à la nation une nouvelle source de bonheur. » Ces premières paroles qui promettaient beaucoup ne furent suivies que d’explications sur la dette et d’annonces de réduction dans les dépenses. Le roi, au lieu de tracer sagement aux états la marche qu’ils devaient suivre, invitait les ordres à être d’accord entre eux, exprimait des besoins d’argent, des craintes d’innovations, et se plaignait de l’inquiétude des esprits, sans annoncer aucune mesure qui pût les satisfaire. Cependant il fut extrêmement applaudi lorsqu’il prononça, en achevant son discours, ces mots qui peignaient bien ses intentions : « Tout ce qu’on peut attendre du plus tendre intérêt au bonheur public, tout ce qu’on peut demander à un souverain, le premier ami de ses peuples, vous pouvez, vous devez l’espérer de mes sentiments. Puisse, messieurs, un heureux accord régner dans cette assemblée, et cette époque devenir à jamais mémorable pour le bonheur et la prospérité du royaume ! c’est le souhait de mon cœur, c’est le plus ardent de mes vœux ; c’est enfin le prix que j’attends de la droiture de mes intentions et de mon amour pour mes peuples. »

Le garde-des-sceaux Barentin parla ensuite ; son discours fut une véritable amplification sur les états-généraux et sur les bienfaits du roi. Après un long préambule, il aborda enfin les questions du moment. « Sa Majesté, dit-il, en accordant une double représentation en faveur du plus nombreux des trois ordres, de celui sur lequel pèse principalement le fardeau de l’impôt, n’a point changé la forme des anciennes délibérations. Quoique celle par tête, en ne produisant qu’un seul résultat, paraisse avoir l’avantage de mieux faire connaître