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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

la souveraineté du peuple, et constitua la république batave, qui contracta une union étroite avec la France, à laquelle elle céda, par le traité de Paris du 16 mai 1795, la Flandre hollandaise, Maëstricht, Venloo et leurs dépendances. La navigation du Rhin, de l’Escaut et de la Meuse fut rendue libre aux deux nations. La Hollande, par ses richesses, contribua puissamment aux moyens de continuer la guerre contre la coalition. Cette importante conquête enleva en même temps un grand appui aux Anglais, et força la Prusse, menacée sur le Rhin et par la Hollande, à conclure à Bâle, avec la république française, une paix à laquelle ses revers et les affaires de Pologne l’avaient depuis quelque temps disposée. La paix se fit aussi à Bâle le 16 juillet avec l’Espagne, alarmée de nos progrès sur son territoire. Figuières et le fort de Roses avaient été pris, et Pérignon s’avançait dans la Catalogne, tandis que Moncey, après s’être rendu maître de Villa-Réal, de Bilbao, de Vittoria, marchait contre les Espagnols retirés sur les frontières de la Vieille-Castille. Le cabinet de Madrid demanda la paix. Il reconnut la république française, qui lui restitua ses conquêtes et qui reçut en échange la partie de Saint-Domingue possédée par l’Espagne. Les deux armées aguerries des Pyrénées passèrent à l’armée des Alpes, qui par ce moyen envahit bientôt le Piémont, et déborda en Italie, où la Toscane seule avait fait la paix avec la république le 9 février 1795.

Ces pacifications partielles et les revers des troupes coalisées dirigèrent les efforts de l’Angleterre et de l’émigration d’un autre côté. Le moment était revenu de prendre le point d’appui contre-révolutionnaire dans l’intérieur. En 1791, lorsqu’il y avait unanimité en France, les royalistes avaient tout espéré des puissances étrangères ; aujourd’hui les dissidences du dedans et les défaites en l’Europe ne leur laissaient d’autres ressources que les conspirations. Les tentatives malheureuses, comme on le sait, ne désespérèrent jamais les partis vaincus : il n’y a que la victoire qui lasse et épuise, et c’est ce qui tôt ou tard ramène la domination de ceux qui attendent.