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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

d’annuler les élections de ce tiers, et voulurent suspendre quelque temps encore le gouvernement constitutionnel. Thibaudeau déjoua leur dessein avec beaucoup de courage et d’éloquence. Le parti conventionnel entier se rangea de son avis. Il repoussait tout arbitraire superflu, et se montrait impatient de sortir d’un état provisoire qui durait depuis trois années. La convention s’établit en assemblée électorale nationale, pour compléter dans son sein les deux tiers. Elle forma ensuite les conseils : celui des anciens, des deux cent cinquante membres, qui, selon le vœu de la nouvelle loi, avaient quarante ans accomplis ; celui des cinq-cents, de tous les autres. Les conseils se constituèrent aux Tuileries. Il s’agit alors de former le gouvernement.

L’attaque de vendémiaire était toute récente ; et le parti républicain, redoutant surtout la contre-révolution, convint de ne choisir les directeurs que parmi les conventionnels, et de plus, parmi ceux qui avaient voté la mort du roi. Quelques membres des plus influents, au nombre desquels était Daunou, combattirent cette opinion qui limitait les choix, et conservait un caractère dictatorial et révolutionnaire au gouvernement ; mais elle l’emporta. Les conventionnels élus furent Larévellière-Lépeaux, investi d’une confiance générale à cause de sa conduite courageuse au 31 mai, de sa probité et de sa modération ; Sièyes, la plus grande réputation de l’époque ; Rewbell, qui avait une grande activité administrative ; Letourneur, l’un des membres de la commission des cinq dans la dernière crise ; et Barras, porté pour ses deux bonnes fortunes de thermidor et de vendémiaire. Sièyes, qui n’avait pas voulu faire partie de la commission législative des onze, ne voulut point entrer non plus dans le directoire. On ne sait si ce fut calcul ou antipathie insurmontable pour Rewbell. Il fut remplacé par Carnot, le seul des membres de l’ancien comité qu’on eût ménagé, à cause de sa pureté politique, et de sa grande participation aux victoires de la république. Telle fut la première composition du directoire. Le 4 brumaire, la convention porta une loi d’amnistie, pour entrer dans le gouvernement légal,