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CONVENTION NATIONALE.

changea le nom de la place de la Révolution en celui de place de la Concorde, et déclara sa session terminée.

La convention dura trois années, du 21 septembre 1792 jusqu’au 26 octobre 1795 (4 brumaire an IV). Elle suivit plusieurs directions. Pendant les six premiers mois de son existence, elle fut entraînée dans la lutte qui s’éleva entre le parti légal de la Gironde et le parti révolutionnaire de la Montagne. Celui-ci l’emporta depuis le 31 mai 1793 jusqu’au 9 thermidor an II (26 juillet 1794). La convention obéit alors au gouvernement du comité de salut public, qui ruina d’abord ses anciens alliés de la commune et de la Montagne, et qui périt ensuite par ses propres divisions. Du 9 thermidor jusqu’au mois de brumaire an IV, la convention vainquit le parti révolutionnaire et le parti royaliste, et chercha à établir la république modérée malgré l’un et malgré l’autre.

Pendant cette longue et terrible époque, la violence de la situation changea la révolution en une guerre, et l’assemblée en un champ de bataille. Chaque parti voulut établir sa domination par la victoire, et l’assurer en fondant son système. Le parti girondin l’essaya et périt ; le parti montagnard l’essaya et périt ; le parti de la commune l’essaya et périt ; le parti de Robespierre l’essaya et périt. On ne put que vaincre, on ne put pas fonder. Le propre d’une pareille tempête était de renverser quiconque cherchait à s’asseoir. Tout fut provisoire, et la domination, et les hommes, et les partis, et les systèmes, parce qu’il n’y avait qu’une chose réelle et possible, la guerre. Il fallut un an au parti conventionnel, dès qu’il eut repris le pouvoir, pour ramener la révolution à la situation légale ; et il ne le put que par deux victoires, celle de prairial et celle de vendémiaire. Mais alors la convention étant revenue au point d’où elle était partie, et ayant rempli sa véritable mission, qui était d’instituer la république après l’avoir défendue, elle disparut de la scène du monde qu’elle avait étonné. Pouvoir révolutionnaire, elle finit au moment où l’ordre légal recommença. Trois années de dictature avaient été perdues pour la liberté, mais non pour la révolution.