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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

tions, annonça, le 28 messidor (juin 1796), aux deux conseils, par un message, que cette guerre civile était définitivement terminée.

C’est ainsi que se passa l’hiver de l’an IV. Mais il était difficile que le directoire ne fût point attaqué par les deux partis dont son existence empêchait la domination, les démocrates et les royalistes. Les premiers formaient une secte inflexible et entreprenante. Le 9 thermidor était pour eux une date de douleur et d’oppression ; ils voulaient toujours établir l’égalité absolue malgré l’état de la société, et la liberté démocratique malgré la civilisation. Cette secte avait été vaincue de manière à ne plus pouvoir dominer. Le 9 thermidor, elle avait été chassée du gouvernement ; le 2 prairial, de la société, et elle avait perdu le pouvoir et les insurrections. Mais, quoique désorganisée et proscrite, elle était loin d’avoir disparu ; après la mauvaise tentative des royalistes en vendémiaire, elle se releva de tout leur abaissement.

Les démocrates rétablirent au Panthéon leur club, que le directoire toléra pendant quelque temps ; ils avaient pour chef Gracchus Babœuf, qui s’appelait lui-même le Tribun du peuple. C’était un homme hardi, d’une imagination exaltée, d’un fanatisme de démocratie extraordinaire, et qui possédait une grande influence sur son parti. Il préparait, dans son journal, au règne de bonheur commun. La société du Panthéon devint de jour en jour plus nombreuse, et plus alarmante pour le directoire, qui essaya d’abord de la contenir. Mais bientôt les séances se prolongèrent dans la nuit ; les démocrates s’y rendirent en armes, et projetèrent de marcher contre le directoire et les conseils. Le directoire se décida à les combattre ouvertement : il ferma le 8 ventôse an IV (février 1796), la société du Panthéon, et le 9 il en avertit, par un message, le corps législatif.

Les démocrates, privés de leur lieu de rassemblement, s’y prirent d’une autre manière : ils séduisirent la légion de police, qui était composée en grande partie de révolutionnaires déplacés ; et, de concert avec elle, ils devaient détruire la cons-