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DIRECTOIRE EXÉCUTIF.

titution de l’an III. Le directoire, instruit de cette nouvelle manœuvre, licencia la légion de police, qu’il fit désarmer par les autres troupes, dont il était sûr. Les conjurés, pris une seconde fois au dépourvu, s’arrêtèrent à un projet d’attaque et de soulèvement : ils formèrent un comité insurrecteur de salut public, qui communiquait par des agents secondaires avec le bas peuple des douze communes de Paris. Les membres de ce comité principal étaient Babœuf, le chef du complot, des ex-conventionnels, tels que Vadier, Amar, Choudieu, Ricord, le représentant Drouët, les anciens généraux du comité décemviral, Rossignol, Parrein, Fyon, Lami. Beaucoup d’officiers déplacés, de patriotes des départements, et l’ancienne masse jacobine, composaient l’armée de cette faction. Les chefs se réunissaient souvent dans un lieu qu’ils nommaient le Temple de la Raison ; ils y chantaient des complaintes sur la mort de Robespierre, et ils y déploraient la servitude du peuple. Ils pratiquèrent des intelligences avec les troupes du camp de Grenelle, admirent parmi eux un capitaine de ce camp, nommé Grisel, qu’ils crurent des leurs, et concertèrent tout pour l’attaque.

Ils convinrent d’établir le bonheur commun, et, pour cela, de distribuer les biens, et de faire prévaloir le gouvernement des vrais, des purs, des absolus démocrates ; de créer une convention composée de soixante-huit Montagnards, reste des proscrits depuis la réaction de thermidor, et de leur adjoindre un démocrate par département ; enfin, de partir des divers quartiers qu’ils s’étaient distribués, et de marcher en même temps contre le directoire et contre les conseils. Ils devaient, dans la nuit de l’insurrection, afficher deux placards, contenant, l’un ces mots : Constitution de 1793, liberté, égalité, bonheur commun ; l’autre cette déclaration : Ceux qui usurpent la souveraineté doivent être mis à mort par les hommes libres. Ils étaient prêts, les proclamations imprimées, le jour fixé, lorsqu’ils furent trahis par Grisel, comme il arrive dans le plus grand nombre des conspirations.