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DIRECTOIRE EXÉCUTIF.

ne purent exercer les droits de citoyens qu’au bout de sept années, après avoir fait, en quelque sorte, un apprentissage de Français. Ce parti, en voulant la domination, ramena la dictature.

Le directoire parvint, à cette époque, à son maximum de puissance : pendant quelque temps, il n’eut point d’ennemis sous les armes. Délivré de toute opposition intérieure, il imposa la paix continentale à l’Autriche par le traité de Campo-Formio, et à l’empire par le congrès de Rastadt. Le traité de Campo-Formio fut plus avantageux au cabinet de Vienne que les préliminaires de Léoben. On lui paya ses états belges et lombards avec une partie des états vénitiens ; cette vieille république fut partagée : la France garda les îles Illyriennes, et donna à l’Autriche la ville de Venise, les provinces de l’Istrie et de la Dalmatie. Le directoire commit en cela une grande faute, et se rendit coupable d’un véritable attentat. On peut, lorsqu’on a le fanatisme d’un système, vouloir rendre une nation libre, mais on ne doit jamais la donner. En distribuant d’une manière arbitraire le territoire d’un petit état, le directoire fournit le mauvais exemple de ce trafic des peuples, trop suivi depuis. D’ailleurs, la domination de l’Autriche devait, tôt ou tard, être étendue en Italie, par l’imprudente cession de Venise.

La coalition de 1792 et 1793 était dissoute ; il ne restait de puissance belligérante que l’Angleterre. Le cabinet de Londres n’était point disposé à céder à la France, qu’il avait attaquée dans l’espoir de l’affaiblir, la Belgique, le Luxembourg, Porentruy, Nice, la Savoie, le protectorat du Piémont, de Gênes, de Milan et de la Hollande. Mais comme il avait besoin d’apaiser l’opposition anglaise, et de refaire ses moyens d’attaque, il fit des propositions de paix ; il envoya en qualité de plénipotentiaire le lord Malmesbury, d’abord à Paris, ensuite à Lille. Mais les offres de Pitt n’étant point sincères, le directoire ne se laissa pas tromper par ses ruses diplomatiques. Les négociations furent rompues deux fois, et la guerre continua entre les deux puissances. Pendant que l’Angleterre négociait à