Page:Mignet - Histoire de la Révolution française, 1838.djvu/408

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
404
RÉVOLUTION FRANÇAISE.

repousse ; le ministère anglais a trahi le secret de son horrible politique. Déchirer la France, détruire sa marine et ses ports, l’effacer du tableau de l’Europe, ou l’abaisser au rang des puissances secondaires, tenir toutes les nations du continent divisées, pour s’emparer du commerce de toutes et s’enrichir de leurs dépouilles : c’est pour obtenir ces affreux succès que l’Angleterre répand l’or, prodigue les promesses, multiplie les intrigues. C’est à vous de commander la paix ; pour la commander, il faut de l’argent, du fer et des soldats ; que tous s’empressent de payer le tribut qu’ils doivent à la défense commune ! que les jeunes citoyens se lèvent : ce n’est plus pour des factions, ce n’est plus pour le choix des tyrans qu’ils vont s’armer ; c’est pour la garantie de ce qu’ils ont de plus cher ; c’est pour l’honneur de la France, c’est pour les intérêts sacrés de l’humanité ! »

La Hollande et la Suisse avaient été mises à l’abri de l’invasion dans la campagne précédente. Le premier consul réunit toutes les forces de la république sur le Rhin et aux Alpes. Il donna le commandement de l’armée du Rhin à Moreau, et marcha lui-même en Italie. Il partit le 16 floréal an VIII (6 mai 1800) pour cette brillante campagne, qui ne dura que quarante jours. Il lui importait de ne pas rester longtemps éloigné de Paris au début de son pouvoir, et surtout de ne pas laisser la guerre indécise. Le feld-maréchal Mélas avait cent trente mille hommes sous les armes ; il occupait l’Italie entière. L’armée républicaine qui lui était opposée ne s’élevait pas à quarante mille hommes. Il laissa le feld-maréchal-lieutenant Ott avec trente mille hommes devant Gênes, et marcha contre le corps du général Suchet. Il entra dans Nice, se disposa à passer le Var et à pénétrer en Provence. Ce fut alors que Bonaparte franchit le grand Saint-Bernard, à la tête d’une armée de quarante mille hommes, descendit en Italie sur les derrières de Mélas, entra dans Milan le 16 prairial (2 juin), et plaça les Autrichiens entre Suchet et lui. Mélas, dont la ligne d’opération se trouvait coupée, revint promptement sur Nice, et de là sur Turin ; il établit son quartier-général à Alexandrie, et