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CONSULAT.

mille et aux droits du prétendant. L’œuvre de la pacification était terminée. Bonaparte, sachant que le plus sûr moyen de commander à une nation est d’augmenter son bien-être, excita le développement de l’industrie, et favorisa le commerce extérieur si longtemps interrompu. Il joignait à ses motifs politiques des vues plus élevées, et il attachait sa gloire à la prospérité de la France ; il parcourut les départements, fit creuser des canaux et des ports, construire des ponts, réparer les routes, élever des monuments, multiplier les communications. Il tint surtout à se montrer le protecteur et le législateur des intérêts privés. Les codes civil, pénal, de commerce, qu’il fit entreprendre, soit à cette époque, soit un peu plus tard, complétèrent à cet égard l’œuvre de la révolution, et réglèrent l’existence intérieure de la nation d’une manière à peu près conforme à son état réel. Malgré le despotisme politique, la France, eut, pendant la domination de Bonaparte, une législation privée, supérieure à celle de toutes les sociétés européennes, qui, avec le gouvernement absolu, conservaient pour la plupart l’état civil du moyen âge. La paix générale, la tolérance commune, le retour de l’ordre et la création du système administratif, changèrent en peu de temps la face de la république. On commença à s’occuper des routes et des canaux. La civilisation se développa d’une manière extraordinaire ; et le consulat fut, sous ce rapport, la période renforcée du directoire, depuis son début jusqu’au 18 fructidor.

C’est surtout après la paix d’Amiens que Bonaparte jeta les fondements de sa puissance future. Il dit lui-même dans les Mémoires publiés en son nom : « Les idées de Napoléon étaient fixées[1] ; mais il lui fallait pour les réaliser le secours du temps et des événements. L’organisation du consulat n’avait rien de contradictoire avec elles ; il accoutumait à l’unité, et c’était un premier pas. Ce pas fait, Napoléon demeurait assez indifférent aux formes et dénominations des divers corps

  1. Mémoires pour servir à l’histoire de France sous Napoléon, écrits à Sainte-Hélène, tome 1, p. 248.