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LES CENT JOURS.

militaires absorbaient alors les pensées de Napoléon : la nation était délivrée de la guerre civile ; le duc d’Angoulême, arrêté, après quelque succès, au Pont-Saint-Esprit, avait capitulé ; puis, fait prisonnier par des paysans, il fut remis en liberté sur l’ordre de l’empereur, et quitta la France : la Vendée elle-même, contenue par les mesures énergiques et conciliantes du général Lamarque, déposait les armes ; mais l’Europe s’avançait menaçante ; les Anglais sous Wellington, les Prussiens sous Blucher, occupaient la Belgique ; un enthousiasme frénétique pour la liberté animait contre Bonaparte les universités allemandes ; à leur voix toute l’Allemagne se soulevait, et derrière elle s’ébranlaient déjà les colonnes russes et les hordes de la Tartarie.

Le génie de Napoléon fait de nouveau surgir en peu de jours une armée formidable du sol de la France. Il peut compter trois cents mille combattants ; sur ce nombre, cent dix mille sont dirigés sur la Belgique : le 12 juin , il part lui-même pour son armée, il va combattre Wellington et Blucher, qui réunissaient chacun quatre-vingt-dix mille hommes sous leurs drapeaux ; son espoir est de les battre séparément et de les exterminer, pour faire face ensuite à l’Autriche et à la Russie. Le 16, un bataille sanglante s’engage autour du village de Ligny, dans la plaine de Fleurus, toujours glorieuse pour nos armes. Les Prussiens sont battus, et perdent vingt-deux mille hommes : Napoléon vainqueur se porte, avec soixante-dix mille soldats seulement, au-devant des forces anglaises, hollandaises et hanovriennes, et les rencontre à Waterloo. Grouchy, à la tête de trente-trois mille hommes, contiendra les troupes battues de Blucher, et empêchera leur jonction avec l’armée de Wellington. Le 18 juin, à onze heures du matin, l’action s’engage : le sort du monde était jeté sur le champ de bataille. Pendant plusieurs heures, l’avantage est aux Français ; déjà l’ennemi songe à la retraite ; vers six heures, Napoléon ordonne une charge formidable, et les Anglais fléchissent ; mais l’arrivée de Grouchy, ou celle de Blucher décidera la victoire : tout à coup, un corps nombreux se montre au loin, sur le flanc droit de l’ar-