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HISTOIRE DE LA RESTAURATION.

trame horrible seront désignés par les chambres à la vengeance des lois. »

Louis XVIII cependant n’avait point encore été proclamé dans la capitale : l’armée française, forte de cent vingt mille hommes et de cinq cents pièces de canon, campait sous les murs de Paris, et la chambre des représentants continuait, au bruit des armes, à discuter d’abstraites théories et à établir des garanties pour les droits de la nation. Les Anglais et les Prussiens s’étaient témérairement avancés, laissant derrière eux une triple ligne de places fortes ; la victoire pouvait encore être disputée : frappés toutefois de l’horrible destin auquel un nouveau revers livrerait la capitale de la France, les chefs du gouvernement et de l’armée, Fouché, duc d’Otrante, et Davoust, prince d’Eckmuhl, signèrent le 3 juillet à Saint-Cloud, avec le duc de Wellington et Blucher, commandants des forces anglaises et prussiennes, une convention militaire par laquelle il fut dit : « Que l’armée française évacuerait Paris et se porterait derrière la Loire ; que les propriétés publiques et particulières seraient respectées, et que les individus, présents dans la ville à l’époque de la capitulation, ne pourraient être inquiétés ni recherchés en rien relativement à leur conduite et à leurs opinions politiques. » Le 8 juillet, le roi fit son entrée à Paris : M. de Talleyrand fut nommé président du nouveau ministère, et le régicide Fouché, qui, ministre de Napoléon, avait activement coopéré au retour de Louis XVIII, obtint pour récompense l’entrée au conseil du roi et le portefeuille de la police. Deux listes de proscrits furent aussitôt dressées : par l’une, dix-neuf généraux ou officiers étaient traduits devant un conseil de guerre ; l’autre renfermait trente-neuf noms ; ceux qu’elle désignait devaient attendre, sous la surveillance de la haute police, que les chambres eussent statué sur leur sort : Carnot était de ce nombre, et ce fut Fouché qui signa les ordonnances de proscription.

Les troupes alliées avaient précédé le roi dans la capitale, et leur contenance irritée donnait à entendre qu’elles croyaient y être entrées bien moins en vertu d’un traité que par le droit