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RÈGNE DE LOUIS XVIII.

tèrent dans l’école de cavalerie de Saumur : ils furent réprimés ; mais ils appelèrent sur ce point les espérances de conspirateurs téméraires. Le général Berton rassembla une troupe de jeunes gens, de soldats et de paysans mal armés, et se mit à leur tête en arborant le drapeau tricolore. Il surprit la ville de Thouars au nom de Napoléon II, et marcha sur Saumur, qu’il ne put emporter. Abandonné de la plupart des siens, il prit la fuite, et tomba bientôt dans un infâme guet-apens. Vers le même temps, éclatait à Béfort une insurrection militaire promptement étouffée, tandis que le ministère prêtait la main aux coupables apprêts d’un piège, dont l’ex-colonel Caron fut à Colmar l’imprudente victime. Deux escadrons, dans l’intention de découvrir ses complices, et de faire tomber sa tête avec celle du maître d’équitation Roger, son ami, sortent un soir de Colmar et de Neuf-Brisach, conduits par des maréchaux-des-logis ; des officiers déguisés sont dans leurs rangs : ces deux troupes parcourent les campagnes et les villages au cri de Vive l’empereur ! et attirent à elles les infortunés Roger et Caron, dont elles exploitent la crédulité au profit des bourreaux ; elles marchent sous leurs ordres, boivent avec eux aux mêmes acclamations ; puis les soldats se jettent sur leurs victimes, les garrottent, et les livrent aux autorités, qui applaudissent à tant de zèle. Quelques jours après, Caron périt fusillé, et il se fit sur la place publique une distribution de récompenses à six agents provocateurs du crime. Aucun fait plus que l’arrestation et le supplice de Caron n’a contribué à flétrir le gouvernement de cette époque ; aucun n’a davantage disposé les esprits à chercher, dans le ministère et dans la police, la source et la provocation de tous les troubles. L’année 1822 vit encore d’autres exécutions sanglantes pour crimes politiques : Berton fut traduit devant la cour d’assises de Poitiers, et le procureur-général Mangin osa désigner, sans les nommer, comme complices du général, les députés les plus influents du côté gauche. Ses paroles soulevèrent, dans la chambre, d’orageuses discussions, qui, sans rien éclaircir, envenimèrent encore l’animosité des partis. Berton et deux de