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RÈGNE DE LOUIS XVIII.

implacables ennemis. Un trappiste fameux, don Antonio Maragnon, avait formé une redoutable bande de guérillas, et marchait à leur tête dans la mêlée, le crucifix à la main. Il avait pris d’assaut la forte place de la Séo d’Urgel : une régence y fut établie, formée du marquis de Mata-Florida, du baron d’Éroles, et de l’archevêque de Tarragone ; elle ouvrait des emprunts, et rendait des proclamations au nom du roi, qu’elle supposait captif. En peu de temps, elle se vit à la tête d’une armée de vingt-cinq mille hommes, qui prit le nom d’armée de la Foi, et s’empara de plusieurs places dans la Navarre et la Catalogne, et pénétra dans l’Aragon. Le général constitutionnel Mina la mit en déroute, reprit les places dont elle s’était emparée, et ne laissa plus aux royalistes d’espoir que dans l’intervention française. Tel était l’état des choses en Espagne lorsque s’ouvrit le congrès de Vérone. MM. de Châteaubriand et Mathieu de Montmorency y représentaient la France, pendant que M. de Villèle obtenait la présidence du conseil. Lord Wellington était au congrès le représentant de l’Angleterre. Le suicide de lord Castlereagh, et l’élévation de M. Canning à la tête du ministère anglais, faisaient pressentir que la politique extérieure de cette puissance allait subir de grandes modifications : aussi, lorsque l’intervention française en Espagne eut été proposée, lord Wellington s’y montra contraire, et fut soutenu par M. de Châteaubriand, dont alors M. de Villèle approuvait la conduite : mais la chambre et la congrégation voulaient la guerre, et, par les soins de M. de Montmorency, elle devint inévitable. La contagion de la révolution espagnole semblait à redouter pour la France et surtout pour l’Italie, aux yeux des royalistes, de M. de Metternich, et des trois souverains alliés. Les Grecs suppliants furent éconduits par eux comme entachés de carbonarisme ; les signataires du traité de la sainte alliance ne mirent aucun obstacle à la vente infâme, aux massacres journaliers d’une population chrétienne, et furent unanimement d’avis de réprimer la révolution espagnole, hostile aux principes sur lesquels repose l’autorité absolue des monarques : leurs ambassadeurs