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ASSEMBLÉE CONSTITUANTE.

oui, tous, tous les ordres réunis, d’être fidèles à ces illustres arrêtés qui seuls aujourd’hui peuvent sauver le royaume. » La constitution sera faite, ajouta le duc de La Rochefoucauld, ou nous ne serons plus. Mais l’accord fut bien plus unanime encore, quand on vint annoncer à l’assemblée le soulèvement de Paris, les excès qui en avaient été la suite, les barrières incendiées, les électeurs assemblés à l’Hôtel-de-Ville, la confusion dans la capitale, et les citoyens prêts à être attaqués par les troupes ou à s’égorger eux-mêmes. Il n’y eut qu’un seul cri dans la salle : « Que le souvenir de nos divisions momentanées soit effacé ! Réunissons nos efforts pour le salut de la patrie ! » On envoya sur-le-champ une députation au roi, composée de quatre-vingts membres, parmi lesquels se trouvaient tous les députés de Paris. L’archevêque de Vienne, président de l’assemblée, était à sa tête. Elle devait représenter au roi les dangers qui menaçaient la capitale et le royaume, la nécessité de renvoyer les troupes et de confier la garde de la ville à la milice bourgeoise ; et si l’on obtenait du roi ces demandes, on devait faire partir une députation pour Paris, afin d’y annoncer ces consolantes nouvelles. Mais cette députation revint bientôt avec une réponse peu satisfaisante.

L’assemblée vit alors qu’elle n’avait plus à compter que sur elle-même, et que les projets de la cour étaient irrévocablement arrêtés. Loin de se décourager, elle n’en devint que plus ferme, et sur-le-champ, à l’unanimité des suffrages, elle décréta la responsabilité des ministres actuels et de tous les conseillers du roi, de quelque rang et état qu’ils pussent être ; elle vota des regrets à Necker et aux ministres disgraciés ; elle déclara qu’elle ne cesserait d’insister sur l’éloignement des troupes et sur l’établissement des milices bourgeoises ; elle plaça la dette publique sous la sauvegarde de la loyauté française, et persista dans tous ses arrêtés précédents. Après ces mesures, elle en prit une dernière, qui n’était pas la moins nécessaire : craignant que, pendant la nuit, on ne fermât militairement la salle des états pour disperser l’assemblée, elle