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RÈGNE DE CHARLES X.

procher : ce mot, et plusieurs autres aussi heureux, et surtout la suppression de la censure, furent des présages favorables au début de ce règne. Mais, en affranchissant la presse, Charles X ne répudiait point la responsabilité des actes d’un ministère flétri par elle ; il l’acceptait au contraire, en déclarant son intention formelle de le maintenir au pouvoir. Alors ceux qui avaient été trop prompts à espérer furent désabusés, et l’indignation publique se souleva menaçante à l’annonce d’une suite de projets impopulaires successivement présentés aux chambres, par la couronne, avec une effrayante rapidité. L’un d’eux, dans lequel le ministre avait habilement fondu le projet de la conversion des rentes en trois pour cent, accordait un milliard à l’émigration comme indemnité ; un autre rétablissait les communautés religieuses de femmes ; un troisième attachait des peines infamantes et atroces aux profanations et aux vols commis dans les églises ; en certains cas, le sacrilège devait être puni de la peine des parricides ; enfin, le projet qui blessa le plus d’intérêts et souleva le plus de ressentiments tendait à arrêter le morcellement des propriétés et à recréer dans les héritages un privilège en faveur de la primogéniture à défaut d’un vœu formellement exprimé par le testateur. Tous ces projets, dictés sous l’influence des anciens émigrés et de la congrégation, étaient conçus dans un esprit contraire à celui de la révolution. La chambre des députés les adopta ; celle des pairs en combattit quelques-uns avec succès ; elle réussit à en faire disparaître les dispositions les plus funestes, et partagea quelque temps, avec les cours royales, la faveur populaire. Ces actes du gouvernement furent interrompus, en 1825, par les solennités du sacre : Charles X parut à Reims entouré de l’ancien appareil de la majesté royale ; là il prêta serment à la charte, et reçut la couronne des mains de l’archevêque, au milieu d’un cérémonial gothique, nullement en harmonie avec les mœurs du siècle, et où la génération nouvelle ne voulut voir qu’un acte de déférence envers le clergé.

Le parti libéral grandissait, se fortifiait de toutes les fau-