Page:Mignet - Histoire de la Révolution française, 1838.djvu/53

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
49
ASSEMBLÉE CONSTITUANTE.

lazaristes, qui contenait beaucoup de grains, avait été dévastée, qu’on avait forcé le Garde-Meuble pour y prendre de vieilles armes, et que les boutiques des armuriers étaient pillées. On craignit les plus grands excès de la part de la multitude ; elle était déchaînée, et il paraissait difficile de maîtriser sa fougue. Mais elle était dans un moment d’enthousiasme et de désintéressement. Elle désarma elle-même les gens suspects ; le blé trouvé chez les lazaristes fut porté à la halle ; on ne pilla aucune maison ; les voitures, les chariots, remplis de provisions, de meubles, de vaisselle, arrêtés aux portes de la ville, furent conduits à la place de Grève, devenue un vaste entrepôt. La foule s’y amoncelait d’un moment à l’autre en faisant toujours entendre le même cri : Des armes ! Il était alors près d’une heure. Le prévôt des marchands annonça l’arrivée prochaine de douze mille fusils de la manufacture de Charleville, qui seraient bientôt suivis de trente mille autres.

Cette assurance apaisa pour quelque temps le peuple, et le comité se livra avec un peu plus de calme à l’organisation de la milice bourgeoise. En moins de quatre heures, le plan fut rédigé, discuté, adopté, imprimé, et affiché. On décida que la garde parisienne serait portée jusqu’à nouvel ordre à quarante-huit mille hommes. Tous les citoyens furent invités à se faire inscrire pour en faire partie ; chaque district eut son bataillon, chaque bataillon ses chefs ; on offrit le commandement de cette armée bourgeoise au duc d’Aumont, qui demanda vingt-quatre heures pour se décider. En attendant, le marquis de La Salle fut nommé commandant en second. La cocarde verte fut ensuite remplacée par la cocarde rouge et bleue, qui étaient les couleurs de la ville. Tout cela fut le travail de quelques heures. Les districts apportaient leur adhésion aux mesures que le comité permanent venait de prendre. Les clercs du Châtelet, ceux du Palais, les élèves en chirurgie, les soldats du guet, et, ce qui valait mieux encore, les gardes-françaises, offraient leurs services à l’assemblée. Des patrouilles commençaient à se former et à parcourir les rues.

Le peuple attendait impatiemment l’effet des promesses du