Page:Mignet - Nouveaux éloges historiques.djvu/32

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livre original et puissant, où il ranime tout ce qu’il entrevoit, rend plausible tout ce qu’il conjecture, fait de l’histoire reçue une légende et croit retrouver dans la légende même l’histoire obscurcie. Si Savigny admira et l’œuvre hardie et la pensée créatrice de Niebuhr, Niebuhr ressentit pour l’infaillible savoir, le grand esprit, le talent régulier de Savigny un irrésistible entraînement. Ils contractèrent des lors une amitié qui devait durer toujours la similitude des goûts et la diversité des génies, la conformité des travaux et la différence des caractères, les tinrent étroitement unis après les avoir heureusement rapprochés. Tous deux faisaient de la chose romaine leur occupation assidue. Niebuhr y portait ses suppositions et ses reconstructions ingénieuses de sa vue perçante, il saisissait à travers les temps obscurs et suivait au milieu des récits défigurés l’état ancien et la marche de cette grande société Savigny, avec moins d’imagination et une trempe d’esprit plus sévère, gardant la justesse dans l’étendue, et joignant la mesure à la force, en retraçait et en expliquait la législation, qu’il connaissait à la fois par ses monuments et dans son histoire. Tous deux avaient