Page:Mill - La Liberté, trad Dupont-White, 1860.djvu/129

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plus heureusement placés, qui entendent quelquefois discuter leurs opinions, et qui ne sont pas tout à fait inaccoutumés à être redressés lorsqu’ils se trompent, placent la même confiance sans bornes dans telles de leurs opinions partagées par ceux qui les entourent, ou par ceux envers qui ils ont une déférence habituelle ; car en proportion du manque de confiance de l’homme dans son propre jugement solitaire, il accorde une foi plus implicite à l’infaillibilité du monde en général. Et le monde est pour chaque individu la portion du monde avec laquelle il est en contact ; son parti, sa secte, son église, sa classe de société : et comparativement on peut trouver qu’un homme a l’esprit étendu et libéral, lorsque ce mot le monde signifie pour lui son pays ou son siècle. La foi de l’homme dans cette autorité collective, n’est nullement ébranlée quoi qu’il sache que d’autres siècles, d’autres pays, d’autres sectes, d’autres églises, d’autres partis, ont pensé et pensent encore exactement le contraire. Il charge son propre monde d’avoir raison contre les mondes dissidents des autres hommes, et il ne s’inquiète jamais de l’idée que le pur hasard a décidé lequel de ces mondes nombreux posséderait sa confiance, et que les mêmes causes qui font de lui un chrétien à Londres, en auraient fait un bouddhiste à Pékin. Cependant la chose en elle-même est aussi évidente que pourraient le prouver tous les arguments possibles.