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JULES NORIAC

LA PENSION ROQUET

(Une multitude de bambins de cinq à douze ans rompent leurs rangs et se groupent autour d’un professeur maigre et râpé.)


Le pion. — Messieurs, vous avez deux heures, usez-en, mais n’en abusez pas ; que la sagesse préside à vos jeux.

Tous. — Oui, m’sieu.

Une voix. — Qui est-ce qui fait aux barres ?

Plusieurs voix. — Moi, moi, moi.

Le petit Bourgeois. — Moi aussi ; mais on ne ramasse pas les morts.

Le pion. — Monsieur Bourgeois ! faites-moi le plaisir de ne point courir l’épaule droite en avant, ainsi qu’un sanglier furieux et déchaîné.

Le petit Bourgeois. — Moi, m’sieu ?

Le pion. — Oui, vous.

Le petit Leprieur. — C’est une métaphore, ça, n’est-ce pas, m’sieu ? parce qu’on n’enchaîne pas les sangliers.

Le pion. — Leprieur, vous êtes coiffé du casque de l’audace, que surmontent encore le cimier de l’impudence et le panache de l’ineptie.

Trente voix (avec horreur). — Oh !

Le petit Gavinet. — M’sieu, Cuchet m’a pris mon képi, il ne veut pas me le rendre.

Le pion. — Il a le sien, c’est une superfétation.

Gavinet. — Je ne sais pas, m’sieu.

Le pion. — Cuchet ! pourquoi avez-vous pris le képi de Gavinet ?

Cuchet. — Au contraire, m’sieu, j’ai voulu le lui rendre ; c’est lui qui n’a pas voulu le reprendre.