Page:Milliet - Une famile de républicains fouriéristes, 1915.djvu/129

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Une veuve
Je te quitte, ô terre natale,
Et sans remords je puis partir :
Garde la pierre sépulcrale
De mon époux, vaillant martyr...

Si je restais dans ces parages.
Un jour mes fils, devenus grands,
Des soldats, assassins à gages,
Par force iraient grossir les rangs.

Non, je les tiens, je les emmène
Vers des bords, où la Liberté,
Au souille pur de son haleine,
Fait reverdir l'Humanité !

La lionne au tigre vorace
Sait arracher ses lionceaux :
Napoléon, je mets l'espace
Entre mes fils et tes bourreaux.

Le chœur
Ravissantes métamorphoses
Qu'accomplissent les temps nouveaux !
Les cyprès se changent en roses,
L'arbre mort pousse des rameaux.
L'Amour est seul maître du monde ;
On sent la terre tressaillir,
Du sein de la tombe féconde
Voyez la vie à flots jaillir
La déesse des temps antiques,
La divine Hospitalité,
À des autels en Amérique,
Où triomphe la Liberté !

Un proscrit
Depuis quatre ans, banni de France,
Je traîne au loin mes tristes jours.
Cherchant à saisir l'Espérance...
Le fantôme échappe toujours...
Mais un bruit vient à mon oreille !
Est-ce Paris qui se réveille ?
Non, ce n'est qu'un royal sabbat :
Le peuple de la grande ville
Fait le beau comme un chien servile
Et lèche la main qui le bat.
Adorant le dieu de la force,
Le vil César du faux serment,
Il laisse en paix ce tigre corse
Broyer la France sous sa dent.
Que dis-je ? En son ivresse étrange.
Il se trouve heureux dans sa fange,
Pourvu que le maître ait souri.
Hugo, laisse là tes ïambes !
Paris chante les dithyrambes
De Belmontet et de Méry.