Page:Milliet - Une famile de républicains fouriéristes, 1915.djvu/55

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Hélas ! le jour de sa naissance
Sa mère n'osa le bénir ;
On la vit pleurer en silence :
Elle songeait à l'avenir.
À son premier cri dans ce monde,
Il n'eut, pour apaiser sa faim.
Rien qu'une mamelle inféconde
Où sa bouche s'attache en vain.

Travaille, travaille, travaille !
Loin du soleil qui luit si beau,
Travaille, travaille, travaille !
Dans la mine, sombre tombeau.

Le père, au retour de l'ouvrage,
Prend l'enfant dans ses bras nerveux,
Et dit à sa femme :
Courage ! Je travaillerai comme deux.
La pauvre mère que déchire
La maladie et les douleurs,
À répondu par un sourire
Encor plus triste que ses pleurs.

Travaille, travaille, travaille !
Loin du soleil qui luit si beau,
Travaille, travaille, travaille !
Dans la mine, sombre tombeau.

O puissance de la nature !
L'enfant croît dans ce triste lieu,
Comme une plante sans culture
Qui pousse à la grâce de Dieu.
Sa faible main soulève à peine
La pioche et la pince de fer,
Que le père avec lui l'emmène :
Ils se plongent dans leur enfer.

Travaille, travaille, travaille !
Loin du soleil qui luit si beau,
Travaille, travaille, travaille !
Dans la mine, sombre tombeau.

Dans les entrailles d'une mine,
Séjour à la tombe pareil,
Là travaille l'homme-machine,
Manquant dair pur et de soleil.
Enseveli dans sa retraite.
Il fouille du matin au soir
Et, de temps à autre, l'on jette
À sa faim un peu de pain noir.

Travaille, travaille, travaille !
Loin du soleil qui luit si beau,
Travaille, travaille, travaille !
Dans la mine, sombre tombeau.

Il grandit, nouveau sacrifice !
Il entend l'appel du tambour ;
L'État le prend pour le service.
Sors de ces lieux, affreux séjour,
Où ton corps chétif se déforme,
Allons, conscrit, redresse-toi !
Tu vas revêtir l'uniforme
Et devenir soldat du Roi.

Travaille, travaille, travaille !
Loin du soleil qui luit si beau,
Travaille, travaille, travaille !
Dans la mine, sombre tombeau.

Embrasse ton père et ta mère.
Puis sous les drapeaux prends ton rang ;
Va donc, enfant du prolétaire.
Tu n'as pas d'or, donne ton sang !
Car, vois-tu bien, l'or seul exempte
D'avoir du courage et du cœur.
Celui qui possède une rente
N'a pas besoin d'autre valeur.

Travaille, travaille, travaille !
Loin du soleil qui luit si beau,
Travaille, travaille, travaille !
Dans la mine, sombre tombeau.