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L’HOMME

Je les ai fort longtemps haïs,

Vieux cœur de voyageur ; et dans tous les pays.

(Silence.)

Cependant, certain jour —

Et c’est là un de ces souvenirs

Qui ne sont plus mesure du temps

Et que l’on aime

Non point pour leur trésor de jours, mais pour eux-mêmes,

Je me laissai porter par une vague humaine

Au sommet d’une tour.

C’était Juillet, c’était Midi. Midi, Juillet.

Il faisait chaud comme aux sources du sang.

Vivre était comme un très vieux vin

De sucre au chevet d’un convalescent.

Dans l’immobilité de l’air

Le feu laissait tomber l’or de sa lourde haleine.

Jamais je n’avais vu si pleine

La coupe de sanglots de l’univers.

L’esprit, la chair,

Le mal et le bien,

La tristesse et la joie,

Le grand et le petit, oh ! comme tout était humain

En moi !

(Silence.)


CHŒUR

Roi,

Parle.


L’HOMME

Et ma vue descendit vers cette chose grise

Dans la vibrante profondeur :