tait établie entre eux deux, qui ignoraient la langue l’un de l’autre, avec la plus grande facilité. D’ailleurs, Misconépémayou avait l’air de deviner instinctivement ce que Cheadle désirait, au point que celui-ci eut peine à croire que l’autre ne savait pas un mot d’anglais. Les Indiens ont une telle finesse dans l’intelligence, leur attention est toujours si éveillée, ils forment leurs conclusions si rapidement, que les signes les plus généraux leur suffisent pour vous comprendre avec exactitude.
Le wolverène avait repris ses visites sur la ligne de nos trappes : il avait brisé toutes celles qu’on avait reconstruites et dévoré toutes les proies qu’il y avait trouvées. Cheadle imagina un moyen qui lui sembla infaillible pour faire tomber l’animal dans ses propres filets. Il répara et redressa toutes les trappes brisées et substitua, non pas partout, mais de temps à autre le long de la ligne, des appâts empoisonnés à ceux qu’il employait ordinairement.
La forêt où nous chassions commençait à l’autre bout de notre lac pour s’étendre vers le nord jusqu’à des limites qui nous étaient inconnues. Elle n’était interrompue que par des lacs et des marais assez nombreux et par des clairières où le bois de haute futaie avait été brûlé. Le trappeur recherche toujours les lacs, non-seulement parce qu’ils rendent ses voyages plus rapides et lui donnent la facilité de pénétrer dans des régions moins battues, mais aussi parce que les canaux qui les mettent en communication et leurs rives sont les lieux que fréquentent et qu’habitent le renard, le pékan et le foutereau. Sur un de ces lacs, on observa une curieuse particularité. C’était plutôt un étang d’un demi-mille de long sur à peu près autant de large mais sans profondeur. L’eau paraissait prise jusqu’au fond excepté à une extrémité, où une source élevait ses bouillons à la surface. Ici la glace n’avait que quelques pouces et laissait même libre un trou d’environ un mètre de diamètre. Dans ce trou, l’eau fourmillait de myriades de petits poissons dont la plupart n’é-