dont elle disait si plaisamment « que ces gens-là frappaient aussi souvent à sa porte que d’autres. »
Cependant Xénocrate vengea complètement l’injure faite à l’honneur du corps, un jour que Laïs s’était fait introduire chez lui où, mettant en usage toutes les ressources de sa coquetterie, elle ne put parvenir à amollir le cœur de ce sévère philosophe. Ce qui lui fit dire gaiement, quoique avec un peu de dépit, « qu’elle avait cru avoir affaire à un homme, mais non pas à une statue. »
Des philosophes se disputèrent un jour sur la question de savoir quels étaient dans une femme les charmes qui stimulaient le plus nos désirs. L’un prétendait que c’était le front ; un autre, les yeux ; un troisième, les joues ; un autre, les lèvres ; en un mot, on passait en revue tous les attraits du sexe. Pour accorder la dissidence de leur opinion, ils en appelèrent à la décision de Laïs, et voici ce qu’elle leur répondit en souriant : « Je suppose que je me trouve seule, dans un lieu secret, avec l’un d’entre vous, quel est le charme que vous chercheriez d’abord ? »
Elle maniait l’arme de la plaisanterie avec grâce et délicatesse. Le sculpteur Miron, se sentant pour elle une galante affection d’humeur, en fut assez mal reçu. Mais n’attribuant sa disgrâce qu’à ses cheveux blanchis par l’âge, il les fit teindre et se présenta devant elle sous l’allure d’un jeune homme. Laïs, jouant l’étonnement, l’éconduisit par ces paroles : « Sot que vous êtes, pourquoi me demander une chose que je viens de refuser à votre père[1] ? »
À la fin, éprise elle-même d’une folle passion pour Hippostrates, Laïs se rendit avec lui en Thessalie, où les femmes, jalouses de sa grande réputation et dans la crainte qu’elle ne corrompît leurs maris , la massacrèrent, à l’âge de 72 ans, dans un temple de Vénus, qui depuis ce forfait
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Inepte, quid me quod recusavi rogas ?
Patri negavi jam tuo.(Ausone, Epigram.)