Page:Mirabeau l'aîné - Erotika Biblion, 1867.djvu/64

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
42
EROTIKA BIBLION

l’on obligeait nos femmes à se prostituer, au moins une fois, en l’honneur de la Divinité ? Et l’on peut juger si la dévotion naturelle au beau sexe lui permettait, au temps où c’était la coutume, de s’en tenir là.

Saint Augustin rapporte, dans sa Cité de Dieu[1], que l’on voyait au Capitole des femmes qui se destinaient aux plaisirs de la Divinité, dont elles devenaient communément enceintes ; il se peut que chez nous aussi plus d’un prêtre desserve plus d’un autel, mais du moins il ne se déguise pas en dieu. L’illustre Père de l’Église que je viens de citer, ajoute, dans le même ouvrage, plusieurs détails qui prouvent que si la religion couvre chez les modernes bien des séductions, le culte des anciens n’était pas du moins aussi décent que le nôtre. En Italie, dit-il, et surtout à Lavinium, dans les fêtes de Bacchus, on portait en procession des membres virils, sur lesquels la matrone la plus respectable mettait une couronne. Les fêtes d’Isis étaient tout aussi décentes.

Saint Augustin donne au même endroit une longue énumération des divinités qui présidaient au mariage. Quand la fille avait engagé sa foi, les matrones la conduisaient au dieu Priape, dont on connaît les propriétés surnaturelles ; on faisait asseoir la jeune mariée sur le membre énorme du dieu ; là, on ôtait sa ceinture, et l’on invoquait la déesse Virginientis. Le dieu Subigus soumettait la fille aux transports du mari. La déesse Prema la contenait sous lui pour empêcher qu’elle ne remuât trop. (On voit que tout était prévu, et que les filles romaines étaient bien disposées.) Enfin venait la déesse Pertunda, ce qui revient à Perforatrice, dont

  1. Liv., VI, chap. IX.