Page:Mirabeau l'aîné - Erotika Biblion, 1867.djvu/63

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
41
LA TROPOÏDE

en parlant de nos coutumes superstitieuses, que les prédicateurs en invectivant contre nos vices. Nous avons le triste avantage de n’avoir été surpassés par aucune nation dans les fureurs du fanatisme ; mais les délires de la superstition ont été portés plus loin dans d’autres religions.

On ne voit pas chez nous de contemplatifs qui, sur une natte, attendent en l’air que la lumière céleste vienne investir leur âme. On ne voit point d’énergumènes prosternés qui frappent du front contre terre pour en faire sortir l’abondance ; de pénitents immobiles et muets comme la statue devant laquelle ils s’humilient. On n’y voit point étaler ce que la pudeur cache, sous le prétexte que Dieu ne rougit pas de sa ressemblance ; ou se voiler jusqu’au visage, comme si l’ouvrier avait horreur de son ouvrage ; nous ne tournons point le dos au midi, à cause du vent du démon ; nous n’étendons pas les bras à l’orient pour y découvrir la face rayonnante de la Divinité ; nous n’apercevons pas, du moins en public, de jeunes filles en pleurs, meurtrir leurs attraits innocents pour apaiser la concupiscence par des moyens qui le plus souvent la provoquent ; d’autres, étalant leurs plus secrets appas, attendre et solliciter, dans la posture la plus voluptueuse, les approches de la Divinité ; de jeunes hommes, pour amortir leurs sens, s’attacher aux parties naturelles un anneau proportionné à leurs forces ; quelques-uns arrêter la tentation par l’opération d’Origène, et suspendre à l’autel les dépouilles de cet horrible sacrifice… Nous sommes assurément bien éloignés de tous ces écarts.

Que diraient nos déclamateurs, si des bois sacrés plantés auprès de nos églises comme autour de leurs temples, étaient le théâtre de toutes les débauches ? si