— Voici la chose, répéta-t-il… Depuis longtemps, vous avez fait une impression profonde sur le cœur de ma fille… Elle vous aime, quoi !… Rosalie n’est pas démonstrative, c’est une personne sérieuse et qui a des principes… mais elle a une âme, une âme comme tout le monde !… Vous, vous n’êtes pas beau… Vous n’êtes pas un aigle… Mais enfin vous avez une bonne place… et puis vous êtes un brave garçon… C’est ce qu’il faut, dans un mariage… Sans compter que nous sommes de vieux amis… et que, si vous n’aviez pas eu des intentions sur ma fille… vous ne seriez pas venu, depuis dix ans, dîner, tous les dimanches, avec nous… C’est évident… Donc, il faut vous marier tous les deux… et le plus vite possible !… Je ne puis pas donner de dot à Rosalie, parce que le commerce ne va pas… Mais je sais que vous n’êtes pas un homme intéressé… Vous êtes un brave garçon… D’ailleurs, Rosalie a un trousseau, un tas de choses utiles dans un ménage…
Il parla longtemps… Je ne l’écoutais plus, et il se passait en moi des choses violentes…
À cette époque, j’étais vierge, vierge de corps… mais non de pensée. Au cours de ma chétive et silencieuse jeunesse, j’avais connu les plus terribles amours… Oui, dans ma petite chambre froide et toujours solitaire, devant ma caisse et mes guichets, j’avais par la pensée, par le cerveau, connu jusqu’aux suprêmes exalta-