Page:Mirbeau - Chez l’Illustre écrivain, 1919.djvu/21

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Le Valet de chambre. — Je m’en fous !… Il n’y a que monsieur !… Monsieur, à la bonne heure !… Parlez-moi de monsieur !…

L’illustre Écrivain. — Tu es trop exclusif, Joseph !

Le Valet de chambre, très digne. — Je ne suis que juste, monsieur !…

L’illustre Écrivain, il a fini de mettre sa cravate, et il se regarde longtemps dans une glace. — C’est vrai !… Elle est parfaite !… Elle est strictement dans la situation !… Ah ! Joseph !… Toi aussi, tu as le sens de la cravate !…

Le Valet de chambre. — C’est notre métier, monsieur, à tous les deux !…

Un silence.

L’illustre Écrivain. — Joseph !… Sais-tu à quoi je pense ?…

Le Valet de chambre. — Non, monsieur.

L’illustre Écrivain. — Je pense à quelque chose d’extraordinaire !

Le Valet de chambre. — Ça ne m’étonne pas ! Tout ce que fait monsieur, tout ce à quoi il pense… est extraordinaire !

L’illustre Écrivain. — Eh bien ! je pense à faire une collection de cravates. Mais une collection psychologique !… Tu comprends ! Imagine-toi des vitrines… anglaises… Dans ces vitrines, des étiquettes, de jolies étiquettes, où seraient énumérés tous les différents états d’âme par où