Page:Mirbeau - Chez les fous, paru dans l’Écho de Paris, 2 juin 1891.djvu/6

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mon amitié… Une nuit que je dormais, il entra dans ma chambre et me vola… devinez quoi ?

Le visiteur

Votre argent ?

Le fou

Pu…u ut !… Ah ! bien oui, mon argent !…

Le visiteur

Votre femme ?…

Le fou

Non, monsieur le préfet… Vous ne devinez pas ?… Non ?… Eh bien, Caramel, c’est incroyable, me vola… ma pensée… ma pensée, comme monsieur le directeur me prit mon nom !… Vraiment, ai-je de la chance ?…

Le visiteur

Mais comment vous êtes-vous aperçu que Caramel vous avait volé votre pensée ?

Le fou

Comment ?… Mais je l’ai vue dans ses mains, monsieur le préfet. Il la tenait dans ses mains, au moment où il me la vola.

Le visiteur

Et comment était-elle ?…

Le fou

Elle était, monsieur le préfet, comme un petit papillon jaune, très joli, très délicat, et qui battait de l’aile ; un petit papillon, comme il y en a sur les roses, les jours de soleil… Je priai Caramel de me