Page:Mirbeau - L’Abbé Jules, éd. 22, Ollendorff.djvu/12

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a quia… Et nous l’aurons à notre charge !… Eh bien vrai ! il ne nous manquait plus que ça !

— Allons, allons, mignonne, voilà encore que tu exagères !… S’il revient, mon Dieu, c’est qu’il n’a jamais pu rester en place… C’est un diable !… Il quitte Paris, comme il a quitté l’évêché, où il serait arrivé à tout, comme il a quitté sa cure de Randonnai, où il était si tranquille, où il y avait tant de casuel… Il lui faut du changement, du nouveau… Il ne se trouve à son aise nulle part !… Quant à sa fortune, hé, hé, je ne suis pas du tout de ton avis… Il était joliment avare, l’abbé, joliment pingre, souviens-toi ?

— D’être pingre, mon ami, cela n’empêche point de gaspiller son bien en de sottes manigances… Sait-on quelles lubies traversent des cervelles pareilles ?… Enfin, tu oublies qu’avant de partir pour Paris, l’abbé a vendu sa ferme, vendu ses deux prés, vendu le bois de la Faudière ?… Pourquoi ? Et tout cet argent, où est-il maintenant ?

— Ça, c’est vrai ! dit mon père, devenu subitement rêveur.

— Sans compter qu’il n’est pas aimé dans le pays… qu’il te nuira dans tes élections, peut-être même dans ta clientèle… Ainsi les Bernard, que tu as tant de peine à maintenir, je ne serais pas étonnée qu’ils te lâchent… Dame ! ça se peut !… Et puis, va donc chercher des gens qui soient aussi souvent malades, et qui paient aussi bien !