Page:Mirbeau - L’Abbé Jules, éd. 22, Ollendorff.djvu/211

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nous avait pas salués. Deux tentatives de réconciliation entreprises par le vieux curé n’avaient point abouti. Celui-ci s’était heurté à une résolution implacable et définitive. Il n’avait pu tirer de Jules que ces mots :

— T’z’imbéé…ciles !… J’ai toujours vécu avec des t’z’imbéciles !… qu’ils me fichent la paix !

Le raisonnement et les prières ne réussissant pas, le curé s’était décidé à employer la menace.

— Écoutez, monsieur l’abbé, lui avait-il dit, en essayant de donner à sa voix une intonation terrible… Vous voulez vous installer ici, comme prêtre habitué… Vous ne pouvez le faire sans mon assentiment… Or j’y veux une condition… C’est de vous remettre avec votre famille.

Jules grommelait toujours :

— T’z’imbée… ciles !… qu’ils me fichent la paix !

— Faites bien attention, monsieur l’abbé… Votre situation, je ne la connais pas, mais je la soupçonne de n’être pas régulière… Ne me poussez pas à bout… Je me plaindrai à l’évêque.

— Plaignez-vous au diable !… Allez-vous-en !… Qu’ils me fichent la paix !… T’z’imbéé… ciles !

Là-dessus, le curé était mort. Le nouveau, qui aimait sa tranquillité, ne chercha pas à approfondir les choses. D’ailleurs l’abbé était venu lui rendre visite, aussitôt après son installation… Tout s’était passé de la meilleure grâce du monde. On avait arrêté l’heure des offices, discuté les menues obligations auxquelles sont astreints, dans une paroisse, les prêtres habitués,