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Page:Mirbeau - La Pipe de cidre.djvu/152

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— Mais qu’est-ce qu’on trouve de drôle à ça !… récriminait aigrement M. Anastase Gaudon.

Et M. Isidore Fleury, déclarait non sans dégoût :

— Quand je pense qu’il y a des hommes qui font ça tous les jours… et qui se ruinent pour faire ça !… Non, c’est incroyable !

Pendant plusieurs semaines, après ces fâcheuses aventures, ils pensaient à l’emploi meilleur et vraiment profitable qu’ils auraient pu faire de leur argent, et ils le regrettaient.

Il n’y eut point d’autre incident dans leur vie. Mais à mesure qu’ils avancèrent en âge, de nouvelles images hantèrent le désert si vaste et si vide de leur cerveau. Des rêves de repos, de campagnes lointaines s’insinuèrent en eux, indécis d’abord. Puis, ils se précisèrent, peu à peu, davantage. M. Anastase Gaudon se voyait en manches de chemise dans un jardin. Il voyait des bêches, des pots de fleurs, une petite maison blanche, une levrette dansant, devant lui, sur ses pattes grêles. Son intelligence s’enrichissait de mille notions, de mille formes, auxquelles il n’avait pas songé jusqu’ici. M. Isidore Fleury, lui, suivait des rêveries en chapeau de paille, en veste de toile, et sur des fonds de saulaie, entre des nénuphars, il distinguait nettement un bouchon rouge s’en aller,