Page:Mirbeau - Le Calvaire.djvu/305

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— Ah ! Monsieur ! répondit la mère Sochard… Est-ce qu’on sait où va Madame ?… Il est venu, ce matin, une espèce de valet de chambre qui a causé à Célestine, et puis Célestine est partie avec une robe de rechange pour Madame… Voilà tout ce que je sais !

En rôdant, dans le cabinet, je trouvai la carte que, la veille, je lui avais envoyée.

— Est-ce que Madame a lu ça ?

— Probablement que non, allez !…

— Et vous ne savez pas où elle est ?

— Ah ! dame, non ! ben sûr… Madame ne me conte point ses affaires !

Je rentrai dans la chambre, m’assis sur la chaise longue.

— C’est bien, mère Sochard… Je vais l’attendre… Et je vous avertis que ça va être drôle !… Ha ! ha !… À la fin, voyez-vous, mère Sochard, il faut que ça éclate !… J’ai eu de la patience… j’ai eu… Eh bien ! en voilà assez !…

Je brandissais mes poings dans le vide.

— Et ça va être drôle, mère Sochard !… et vous pourrez vous vanter d’avoir assisté à un spectacle drôle, que vous n’oublierez jamais, jamais !… Et la nuit vous en rêverez, avec épouvante, nom de Dieu !

— Ah ! monsieur Mintié !… monsieur Mintié !… supplia la vieille femme. Pour l’amour du bon Dieu, calmez-vous… Allez-vous-en !… Vous commettrez un malheur, c’est sûr !… Et qu’est-ce que vous ferez, monsieur Mintié ?… Qu’est-ce que vous ferez ?…