Page:Mirbeau - Le Jardin des supplices.djvu/216

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pour être l’avant-coureur du spasme, parcourut tout son corps. Ses lèvres devinrent instantanément plus rouges et gonflées.

— As-tu senti ?… fit-elle d’une voix brève et sourde.

— Je sens l’arôme des pivoines qui emplit le jardin… répondis-je.

Elle frappa la terre de son pied impatient :

— Ce n’est pas cela !… Tu n’as pas senti ?… Rappelle-toi !…

Et, ses narines encore plus ouvertes, ses yeux plus brillants, elle dit :

— Cela sent, comme quand je t’aime !…

Alors, vivement, elle se pencha sur une plante, un thalictre qui, au bord de l’allée, dressait une longue tige fine, branchue, rigide, d’un violet clair. Chaque rameau axillaire sortait d’une gaine ivoirine en forme de sexe et se terminait par une grappe de toutes petites fleurs, serrées l’une contre l’autre et couvertes de pollen…

— C’est elle !… c’est elle !… Oh ! mon chéri !…

En effet, une odeur puissante, phosphatée, une odeur de semence humaine montait de cette plante… Clara cueillit la tige, me força