Page:Mirbeau - Le Jardin des supplices.djvu/26

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corruption ou de leur « jobardise ». Quoi qu’il en soit, la comtesse Borska et mon ami Eugène Mortain souhaitaient vivement de se mettre dans le jeu du mystérieux baron, d’autant plus vivement que celui-ci opposait à des avances discrètes, mais précises, une non moins discrète et précise froideur. Je crois même que cette froideur avait été jusqu’à la malice d’un conseil, de quoi il était résulté, pour nos amis, une liquidation désastreuse. Alors, ils imaginèrent de lancer sur le banquier récalcitrant une très jolie jeune femme, amie intime de la maison et de me lancer, en même temps, sur cette très jolie jeune femme qui, travaillée par eux, était toute disposée à nous accueillir favorablement, le banquier, pour le sérieux, et moi, pour l’agrément. Leur calcul était simple et je l’avais compris du premier coup : m’introduire dans la place, et, là, moi par la femme, eux par moi, devenir les maîtres des secrets du baron, échappés aux moments de tendre oubli !… C’était ce qu’on pouvait appeler de la politique de concentration.

Hélas ! le démon de la perversité, qui vient me visiter à la minute décisive où je dois