Page:Mirbeau - Les Écrivains (deuxième série).djvu/233

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

chic, doublement très chic, un de ces vieux clubmen si élégants, si intelligents, si vieille France, comme les dessine Sem avec sa férocité joyeuse, tragiquement joyeuse… Je le vois d’ici, le vieil habitué… Et tel que je le vois… ah ! comme il me fait regretter toutes les splendeurs des régimes déchus !

Oh ! oh ! c’est un vieil habitué !

Est-ce véritablement un homme très chic, ce vieil habitué ?… Ici, je me sens plein d’incertitudes et d’hésitations. Avec les journaux, même avec les journaux d’un décorum aussi parfait que celui du Gaulois, on ne sait jamais a quoi s’en tenir sur le compte des vieux habitués… Et ils auraient peut-être de drôles de surprises, les lecteurs assidus — car il y a aussi les lecteurs assidus — s’ils pouvaient voir les drôles de types que recouvrent ordinairement ces masques troublants de « vieil habitué », de « vieil académicien », de « vieux général », de « vieux juriste », de « vieux sénateur », qui, de temps en temps, au moment des grands événements parisiens, viennent conter, dans les journaux, leurs souvenirs et leurs regrets.

J’ai souvenance — combien j’ai triste souvenance ! — d’un pauvre diable qui était d’ailleurs le plus brave et le plus touchant garçon de la terre… Il y a déjà plus de quinze ans, qu’il rédigeait, au même Gaulois, les échos mon-