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Page:Mirbeau - Les Écrivains (première série).djvu/273

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d’honneur et de paix, contre les envahissements mauvais et les mauvaises œuvres de la politique. Pour expliquer de pareilles rigueurs, pour justifier de semblables attentats à la liberté et à l’honneur d’un citoyen, il faut donc qu’elle ait recueilli non seulement de graves soupçons, mais d’indéniables certitudes, et qu’elle les ait recueillis à des sources pures.

Or, nous ne savons rien, on ne veut rien nous dire, on ne peut rien nous dire. Devant les interrogations anxieuses des amis, devant cet inexprimable martyre de la mère, la police est muette, la justice est muette. La police a accompli son œuvre de ténèbres, et elle s’en lave les mains ; la justice informe. Elle informe sur des bavardages de nouvellistes et des délations de concierges, repoussant le témoignage de ceux-là qui ont vécu avec le prisonnier, qui connaissent le fond de son âme, et se portent garants de son innocence. Et, pendant ce temps, un homme est là, à qui l’on a tout pris ; un homme est là, entre quatre murs, plus pesants à son crâne que les quatre cloisons d’une bière ; un homme est là, ignorant ce qu’on veut de lui, ce qui l’attend au-delà des murs, et qui, pour reposer sa vue de l’affreuse suggestion de malheur qui suinte des pierres de la geôle, n’a que le visage indifférent de ses gardiens et l’œil du juge. Or, celui qui a vu l’œil du juge, a vu le fond de la désespérance humaine.

Il y a des choses qu’il ne faut point oublier et que nous devons redire, sans cesse, afin qu’elles