Page:Mirbeau - Les Vingt et un Jours d’un neurasthénique, 1901.djvu/260

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dans notre pays… un fameux pays, vous savez ?

Chomassus fut très flatté de ces avances. Il remercia humblement, en termes embarrassés mais reconnaissants… Le marquis ajouta en lui serrant la main à la briser :

— Et puis… ne vous gênez pas… sapristi !… Disposez de moi pour tout ce dont vous aurez besoin ici… Et ne craignez pas de m’embêter…

Comme l’ancien facteur aux Halles, ému de cette cordialité un peu bruyante mais si franche, se dépensait en reconnaissances éperdues :

— C’est tout naturel, mon cher… rassura le marquis… voyons… entre gentilshommes, sapristi !

Alors, timidement, presque honteusement, le brave Chomassus répliqua :

— C’est que… je ne suis pas gentilhomme, moi… monsieur le marquis… Il s’en faut de beaucoup, même !

À quoi le marquis, répondit :

— Qu’est-ce que vous dites là, mon cher ?… On est gentilhomme… quand on a du cœur… et vous avez du cœur… sacré mâtin !… Ça se voit toit de suite…

Le temps que dura sa visite, il l’accabla de bourrades amicales et familières, de protestations joyeuse qui donnaient confiance. Aussi, rentré chez lui, le soir, le bon commerçant disait à sa femme, avec enthousiasme :

— Ça va bien… tout va bien… Nous avons pour