Page:Mirbeau - Lettres de ma chaumière.djvu/429

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comme un fauve dans les broussailles à travers lesquelles reluit le canon d’un fusil ? Quand la nuit sera venue, quand la lune balaiera de ses rayons le tronc des grands chênes que le soleil empourpre maintenant, deux coups de feu retentiront dans le silence, le silence plein de carnages et d’agonies de la forêt. Est-ce un chevreuil qui sera tué, ou bien est-ce un garde qui se tordra sur la bruyère pourprée, des chevrotines au flanc ?



Et tout à coup, dans le chemin creux, j’entendis crier : « À l’assassin ! » Ah ! comme il était douloureux, prolongé, implorant, cet appel ! Je me cachai derrière un tronc d’orme. Une bande de moineaux s’envola, disparut ; un lapin, réveillé par le cri, détala de son gîte, montrant, comme une petite fumée blanche, la houppe de son derrière. « À l’assassin ! » Des paysans qui labouraient, d’au-