Page:Mirbeau - Sébastien Roch, 1890.djvu/209

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après l’autre, entrer, se débattre, se livrer, déjà domptés, aux vices impubères ; il entendit leurs sanglots, leurs cris, amortis sous les bâillons et les poings furieux ; leurs appels, leurs rires, leurs chocs, étouffés dans les oreillers froissés ; et ce fut une mêlée horrible de petits corps nus, de petites gorges râlantes, un bruit de chairs piétinées, de membres rompus, quelque chose de sourd, de rauque, comme un meurtre. L’hallucination se continua. D’autres figures envahirent la chambre, en chantant. Échevelées, ivres, barbouillées de liqueurs puantes, elles dansaient des danses obscènes, l’entourant de rires diaboliques, d’impudiques grimaces, le frôlant de contacts qui brûlaient comme du feu : « Nous reconnais-tu ! Nous sommes tes petites années, tes années d’ignorance et de pureté. Comme tu nous as ennuyées, si tu savais Et que nous étions laides !… Regarde comme nous sommes gentilles, maintenant que le Père de Kern nous a révélé le plaisir ! Nous ne voulons plus de toi… Il nous attend… Adieu ! » D’autres apparurent. Elles étaient débraillées, la gorge nue et lui soufflaient au visage des bouffées de cigarette : « Nous sommes tes prières, tes poésies, tes extases !… Oh ! là là !… Nous en avons assez d’être des âmes, et nous allons au rendez-vous que nous a donné le Père de Kern !… Adieu ! » Elles faisaient des gestes onaniques, montraient de frénétiques sexes : « Et moi ?… Pourquoi m’as-tu fui ? Pourquoi repoussais-tu ma lèvre ? » C’était Marguerite. « Allons, viens avec moi. Je sais un endroit où les fleurs enivrent comme l’haleine de ma bouche, où les fruits sont plus savoureux que la pulpe de ma chair. Là, je