Page:Mirbeau - Sébastien Roch, 1890.djvu/327

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III


Depuis sa maladie, Sébastien, à force d’ingéniosité, avait pu éviter les rendez-vous, le soir, sur les bancs de l’allée des Rouvraies. Il avait d’abord prétexté de sa faiblesse, de sa santé qui ne se rétablissait pas ; puis, du peu de liberté que lui laissait son père, maintenant. Marguerite n’avait pas osé insister devant la première raison ; elle s’offensa de la seconde. Est-ce que sa mère lui laissait de la liberté à elle ? Et ne trouvait-elle pas le moyen de s’échapper de la maison, bravant les dangers, surmontant tous les obstacles ? Bien qu’il fît en sorte de ne jamais rester seul avec elle, Marguerite, avec une merveilleuse adresse, savait profiter d’un éclair de répit, d’une seconde où sa mère tournait la tête pour lancer à Sébastien un mot, le plus souvent de prière, quelquefois de menace. Mais il paraissait ne pas entendre. Elle était surexcitée, fébrile ; un feu sombre dévorait ses deux prunelles qui semblaient s’agrandir encore : « Je ne sais pas ce qu’a Marguerite, soupirait Mme  Lecautel… Je la