Page:Mirbeau - Théâtre II.djvu/136

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c’est à toi que je dois d’être redevenu cet homme nouveau… car ce n’est pas toi seulement que j’ai aimée, entends-tu bien ?… c’est toute l’humanité, et c’est tout l’avenir et c’est tout mon rêve que j’ai aimés en toi !…

Il la prend dans ses bras.
Madeleine

Taisez-vous… Oh ! taisez-vous… vous ne pouvez pas me dire de telles paroles… C’est trop beau… Je n’aurais pas le droit d’être si heureuse…

Jean

On peut tout nous prendre, Madeleine… on ne peut pas nous prendre ce bonheur-là, que nous avons créé de nous-mêmes… Tous les deux, désormais, nous serons forts contre la vie….

Madeleine

Ce n’est pas possible… ce n’est pas possible…

Jean

Et quand, dans notre maison, je rentrerai du travail ou de la lutte, fatigué, peut-être, écœuré aussi, peut-être, pense à cette joie, à cette lumière… tes yeux, Madeleine, ta voix, Madeleine, ton cœur, Madeleine… ton grand courage, Madeleine, Madeleine, Madeleine !…

Madeleine

Oh ! Jean ! Jean ! Des pauvres, comme nous, il ne faut pas défier le bonheur… Il ne faut pas, surtout, me croire plus que je ne suis…

Jean

Tu es celle par qui je crois encore à ce qui doit arriver…