Page:Mirbeau - Théâtre II.djvu/191

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Geneviève que vous aviez demandé des troupes pour réprimer la grève… et qu’elles arrivent aujourd’hui… (D’un ton pénétré.) J’ai compris que c’était la catastrophe… je n’ai pu supporter l’idée que des centaines d’hommes… pour un malentendu qu’il est possible encore de dissiper… allaient mourir ici !… Du sang ici !… Du sang sur cette maison et sur vous !… (Un temps.) Alors, je suis allé trouver Jean Roule.

Hargand

Pourquoi, lui… et pas moi ?… Pourquoi ne m’as-tu pas parlé à moi ?

Robert

Hélas ! mon père, vous me l’aviez défendu… Et, d’ailleurs, je me suis dit que c’était inutile !

Hargand

Qu’en savais-tu ?

Robert

Je vous connais assez pour savoir que cette résolution terrible, vous ne l’aviez pas prise par hasard, et sans de longs combats avec vous-même… Je n’avais pas de chance d’être écouté… (Sur un mouvement d’Hargand.) Oh ! mon père, je vous en supplie… ne vous attachez pas à la lettre seule de mes paroles… ne retenez que le sens que je leur donne, et l’intention respectueuse qui me les dicte !… Jean Roule, si exalté, si violent, n’est pas inaccessible à la raison… Et je lui crois une âme remplie de pitié… J’essayai de lui faire comprendre la responsabilité qu’il encourrait… et qu’il tenait des milliers de vie dans ses mains… De lui-même, il me promit qu’il viendrait aujourd’hui vous porter de nouvelles proposi-