Page:Mirbeau - Théâtre III.djvu/288

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bien de fois, au contraire, n’ai-je été obligé de calmer vos audaces…

L’Amante

Mes audaces ?… Le mot est joli…

L’Amant, rectifiant.

Vos chères audaces… Combien de fois j’ai tenté d’atténuer vos élans… de vous montrer les dangers de vos généreuses imprudences…

L’Amante

C’est odieux !…

L’Amant

Je ne vous les reproche pas… comprenez-moi bien, chère, chère aimée ; au contraire… j’en étais fier… j’en étais ivre… Je me disais : « Quelle grande âme !… Quelle grande âme libre !… Elle m’aime assez pour braver l’opinion… les préjugés… la sottise mondaine… » Vous étiez sublime ainsi…

L’Amante

Vraiment ?… En vérité, c’est admirable… Votre inconscience passe l’imagination… Alors vous croyez que j’avais l’impérieux besoin de crier à tout le monde : « Voilà mon amant… Regardez bien ce monsieur qui est là… c’est mon amant… » Comme c’est naturel, n’est-ce pas ?… Comme c’est féminin ?… (Avec colère.) Et c’est ainsi que vous m’estimez ?… Pour qui me prenez-vous donc ?… Suis-je donc une fille ?

L’Amant

Mais qu’est-ce que vous dites ?… Qu’est-ce que vous dites ?… Où allez-vous chercher tout ce que vous dites ?