Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/138

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Ont rien d’impénétrable à des traits si charmants.
Pour moi, dans ses discours, comme dans son visage,
Je vois pour sa naissance un noble témoignage ;
Et je crois que le ciel dedans un rang si bas
Cache son origine, et ne l’en tire pas.

Mascarille.

Vous êtes romanesque avecque vos chimères.
Mais que fera Pandolfe en toutes ces affaires ?
C’est, monsieur, votre père, au moins à ce qu’il dit.
Vous savez que sa bile assez souvent s’aigrit,
Qu’il peste contre vous d’une belle manière,
Quand vos déportements lui blessent la visière.
Il est avec Anselme en parole pour vous
Que de son Hippolyte on vous fera l’époux,
S’imaginant que c’est dans le seul mariage
Qu’il pourra rencontrer de quoi vous faire sage;
Et s’il vient à savoir que, rebutant son choix,
D’un objet inconnu vous recevez les lois,
Que de ce fol amour la fatale puissance
Vous soustrait au devoir de votre obéissance,
Dieu sait quelle tempête alors éclatera,
Et de quels beaux sermons on vous régalera.

Lélie.

Ah ! treve, je vous prie, à votre rhétorique !

Mascarille.

Mais vous, trève plutôt à votre politique !
Elle n’est pas fort bonne, et vous devriez tâcher…

Lélie.

Sais-tu qu’on n’acquiert rien de bon à me fâcher
Que chez moi les avis ont de tristes salaires,
Qu’un valet conseiller y fait mal ses affaires ?

Mascarille.

(à part.) Il se met en courroux. (haut.) Tout ce que j’en ai dit
N’étoit rien que pour rire et vous sonder l’esprit.
D’un censeur de plaisirs ai-je fort l’encolure ?
Et Mascarille est-il ennemi de nature ?
Vous savez le contraire, et qu’il est très certain
Qu’on ne peut me taxer que d’être trop humain.
Moquez-vous des sermons d’un vieux barbon de père ;
Poussez votre bidet, vous dis-je, et laissez faire.